VISITE À "VILLA NAZARETH"
PAROLES DU PAPE FRANÇOIS
Samedi 18 juin 2016
Beaucoup de personnes sont concernées par ce passage de l’Evangile: celui qui pose la question « qui est mon prochain ? » ; Jésus ; puis dans la parabole, les brigands, le pauvre à moitié mort sur la route, puis le prêtre, puis le docteur de la loi, sans doute avocat [ le « lévite » ] ; puis l’aubergiste, l’hôtelier.
Dans la parabole, sans doute ni le prêtre, ni le docteur de la loi ni le samaritain ni l’hôtelier ne savaient répondre à la question : « qui est mon prochain ? » ; sans doute ne savaient-ils pas même comment était « le prochain », qui était « le prochain ». Le prêtre était pressé, comme tous les prêtres, parce qu’il a regardé sa montre : « Je dois dire la Messe », ou, si souvent : « J’ai laissé l’église ouverte, je dois la fermer, parce que l’horaire est celui-ci et je ne peux pas rester ici». Le docteur de la loi, un homme pratique, a dit: «Si je me mêle de cela, demain, je devrai aller au tribunal, comparaître comme témoin, dire ce que j’ai fait, je perds deux, trois jours de travail... Non, non, mieux...». Vive Ponce Pilate, et il s’en est allé. En revanche, l’autre [ le samaritain ], pécheur, étranger qui n’était pas vraiment du peuple de Dieu, s’est ému : « il eut de la compassion » et s’arrêta. Tous les trois — le prêtre, l’avocat et le samaritain — savaient bien, connaissaient bien ce qu’il fallait faire. Et chacun d’eux a pris sa décision. Mais j’aime penser à l’hôtelier : c’est l’anonyme. Il a regardé tout cela, il a vu et n’a rien compris. « Mais il est fou ! Un samaritain qui aide un juif ! Il est fou ! Puis, avec ses mains, il guérit ses blessures et l’amène ici, à l’auberge, et me dit : “ Prends soin de lui, je te paierai s’il y a quelque chose en plus...”. Je n’ai jamais rien vu de semblable, c’est un fou ! ». Et cet homme a reçu la Parole de Dieu : dans le témoignage. De qui ? Du prêtre, non, parce qu’il ne l’avait même pas vu; de l’avocat, c’est la même chose. Du pécheur, un pécheur qui a eu de la compassion». Et il ne comprenait rien, il est resté avec le doute, peut-être mêlé de curiosité : « Mais qu’est-ce qui est arrivé ici ? C’est étrange... ». Avec l’inquiétude en lui ; et c’est ce que fait le témoignage. Le témoignage de ce pécheur a semé l’inquiétude dans le cœur d’un aubergiste ; et ce qui lui est arrivé, l’Evangile ne le dit pas, pas plus que son nom. Mais certainement, cet homme... — cela est sûr, parce que lorsque l’Esprit Saint sème, il fait croître — il est certain que sa curiosité a grandi, son inquiétude, il l’a laissée croître dans son cœur et a reçu le message du témoignage. Puis, plusieurs jours plus tard, le samaritain est passé de nouveau par là; il a certainement payé quelque chose. Ou alors [ l’aubergiste lui a dit ] : « Non, laisse, laisse ; je mets cela sur mon compte ». Peut-être cela a-t-il été sa première réaction au témoignage.
Et pourquoi est-ce que je m’arrête, aujourd’hui, sur cette personne ? Parce que notre témoignage ne peut pas être comptabilisé — je ne sais pas comment on dit —. Le témoignage est une façon de vivre telle que les autres «voient vos bonnes œuvres et glorifient votre Père qui est dans les cieux » (Mt 5, 16), c’est-à-dire qu’ils rencontrent le Père, qu’ils vont à Lui... Ce sont les paroles de Jésus.
Moi, à propos de Villa Nazareth, j’ai entendu dire : « Il y a cette Œuvre... », mais je ne la connaissais pas bien. Puis Mgr Celli m’a dit quelque chose... C’est une Œuvre, un travail où l’on favorise le témoignage. Ici, on ne vient pas pour « monter les échelons » ni pour gagner de l’argent, non, mais pour suivre les traces de Jésus et témoigner de Jésus, semer le témoignage. Dans le silence, sans explications, par les gestes... Reprendre le langage des gestes. Et assurément, cet aubergiste est au ciel, assurément ! Parce que cette semence a certainement grandi, a germé. Il a vu une chose que jamais, jamais, il n’aurait pensé voir. Et cela est le témoignage. Le témoignage passe et s’en va. Tu le laisses là et tu t’en vas. Seul le Seigneur le conserve, le fait croître, comme il fait croître la semence : tandis que le maître dort, la plante pousse.
Je souhaite que cette Œuvre continue d’être une Œuvre de témoignage, une maison de témoignage ; de témoignage à tous, à tous. De témoignage pour les gens qui s’approchent, ou qui en entendent parler... un témoignage. Voilà ce que je souhaite. Et que le Seigneur nous libère des brigands — il y en a tant! — qu’il nous libère des prêtres pressés ou qui sont toujours pressés, qui n’ont pas le temps d’écouter, de voir, ils doivent faire leurs affaires...; qu’il nous libère des docteurs qui veulent présenter la foi de Jésus Christ avec une rigidité mathématique; et qu’il nous enseigne à nous arrêter et qu’il nous enseigne cette sagesse de l’Evangile : « se salir les mains ». Que le Seigneur nous donne cette grâce. Merci.
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