JEAN-PAUL II
2. Il faut se réjouir du fait que l'approfondissement de la "féminité" ait contribué, dans la culture contemporaine, à repenser le thème de la personne humaine en fonction du réciproque "être pour l'autre", dans la communion interpersonnelle. Aujourd'hui, concevoir la personne dans sa dimension oblative est en passe de devenir une acquisition de principe. Malheureusement, cela reste souvent lettre morte sur le plan pratique. Parmi les nombreuses agressions à la dignité humaine, il faut donc dénoncer avec force la violation courante de la dignité de la femme, qui se manifeste par l'exploitaton de sa personne et de son corps. Il faut empêcher avec force toute pratique qui offense la femme dans sa liberté et sa féminité: ce qui est défini comme "tourisme sexuel", la vente de jeunes filles, la stérilisation de masse et, en général, toute forme de violence à l'égard de l'autre sexe.
L'attitude requise par la loi morale, qui prêche la dignité de la femme comme personne créée à l'image d'un Dieu-Communion, est bien différente! Il est aujourd'hui plus que jamais nécessaire de reproposer l'anthropologie biblique de la relation, qui aide à saisir de façon authentique l'identité de la personne humaine dans sa relation avec les autres personnes et en particulier entre homme et femme. Dans la personne humaine, pensée en termes de "relation", se retrouve un vestige du mystère même de Dieu, révélé dans le Christ comme unité substantielle dans la communion de trois personnes divines. A la lumière de ce mystère, on comprend bien l'affirmation de Gaudium et spes selon laquelle la personne humaine "seule créature sur terre que Dieu a voulue pour elle-même, ne peut pleinement se trouver que par le don désintéressé d'elle-même" (GS, n. 24). La diversité entre l'homme et la femme rappelle l'exigence de la communion interpersonnelle, et la méditation sur la dignité et la vocation de la femme corrobore la conception de la communion de l'être humain (cf. Mulieris dignitatem, n. 7).
3. C'est précisément cette attitude de communion, que la féminité évoque avec force, qui permet de repenser la paternité de Dieu, en évitant des projections figuratives de type patriarcal tellement contestées, non sans raison, dans certains courants de la littérature contemporaine. Il s'agit, en effet, de saisir le visage du Père à l'intérieur du mystère de Dieu en tant que Trinité, c'est-à-dire unité parfaite dans la distinction. La figure du Père doit être reméditée en ce qui concerne son lien avec le Fils, qui est tourné vers lui depuis l'éternité (cf. Jn 1, 1) dans la communion de l'Esprit Saint. Il faut également souligner que le Fils de Dieu s'est fait homme dans la plénitude des temps et qu'il est né de la Vierge Marie (cf. Ga 4, 4), ce qui jette également une lumière sur la féminité, en montrant en Marie le modèle de femme voulu par Dieu. En Elle, et à travers Elle, a eu lieu ce qu'il y a de plus grand dans l'histoire des hommes. La paternité de Dieu-Père se trouve non seulement en relation avec Dieu-Fils dans le mystère éternel, mais également avec son Incarnation qui a eu lieu dans le sein d'une femme. Si Dieu-Père, qui "engendre" le Fils depuis l'éternité, a valorisé une femme, Marie, pour "l'engendrer" dans le monde, la faisant ainsi devenir "Theotokos", Mère de Dieu, cela n'est pas sans signification pour comprendre la dignité de la femme dans le projet divin.
4. C'est pourquoi, l'annonce évangélique de la paternité de Dieu, loin de constituer une limitation à l'égard de la dignité et du rôle de la femme, se présente au contraire comme une garantie de ce que la "féminité symbolise humainement, c'est-à-dire accueillir, prendre soin de l'homme, engendrer la vie. Tout cela est en effet enraciné de façon transcendante dans le mystère de "l'engendrement" divin éternel. La paternité en Dieu est certes entièrement spirituelle. Toutefois, elle exprime cette réciprocité éternelle et cette relation proprement trinitaire qui se trouve à l'origine de toute paternité et fonde la commune richesse de l'homme et de la femme.
La réflexion sur le rôle et la mission de la femme se situe donc à juste titre dans cette année consacrée au Père, en nous incitant à un engagement encore plus incisif, pour que soit reconnu à la femme toute la place qui lui revient dans l'Eglise et dans la société.
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Parmi les pèlerins de langue française qui assistaient à l'Audience générale du 24 novembre 1999, se trouvaient les groupes suivants, auxquels le Saint-Père s'est adressé en français:
De France: Groupe de jeunes de Melun.
De Belgique: Groupe du Mouvement mondial des Travailleurs chrétiens.
Chers frères et soeurs,
Le grand Jubilé est une occasion pour affronter les défis de notre époque, notamment celui qui est lié au respect des droits de la femme. Le Livre de la Genèse affirme que Dieu créa l'homme à son image, qu'il les créa homme et femme, manifestant ainsi qu'ils sont véritablement à l'image de Dieu dans leurs relations réciproques.
Comme on note aujourd'hui encore de nombreuses violations de la dignité de la femme, qui offensent sa liberté et sa féminité, il importe donc de proposer l'anthropologie biblique de la relation. Celle-ci doit aider à reconnaître de manière authentique l'identité de la personne dans son rapport avec les autres, en particulier entre homme et femme, relation qui renvoie au mystère même de Dieu, révélé par le Christ comme unité dans la communion trinitaire.
La paternité de Dieu, qui exprime la réciprocité trinitaire, est à l'origine de toute paternité et de toute maternité; elle fonde la richesse commune des caractères masculin et féminin. La réflexion sur le rôle et la mission de la femme est importante au cours de l'année consacrée au Père, invitant nos contemporains à un engagement encore plus fort pour que l'espace qui lui revient soit toujours plus reconnu à la femme, dans l'Eglise et dans la société.
J'accueille avec plaisir les pèlerins francophones, en particulier le groupe du Mouvement mondial des Travailleurs chrétiens et la délégation des jeunes de Melun. J'accorde à tous de grand coeur la Bénédiction apostolique.
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