PÈLERINAGE APOSTOLIQUE EN FRANCE
LETTRE DU PAPE JEAN-PAUL II
AU PRÉPOSÉ GÉNÉRAL DE LA COMPAGNIE DE JÉSUS
Paray-le-Monial (France), 5 octobre 1986
Au Révérend Père Peter-Hans Kolvenbach
Préposé général de la Compagnie de Jésus
Au cours de mon pèlerinage à Paray-le-Monial, je désire venir prier dans la chapelle où est vénéré le tombeau du bienheureux Claude La Colombière. Il fut “le serviteur fidèle” que, dans son amour providentiel, le Seigneur a donné comme directeur spirituel à sainte Marguerite-Marie Alacoque. C’est ainsi qu’il fut amené, le premier, à diffuser son message. En peu d’années de vie religieuse et de ministère intense, il se révéla un “fìls exemplaire” de la Compagnie de Jésus à laquelle, au témoignage de sainte Marguerite-Marie elle-même, le Christ avait confié la charge de répandre le culte de son Cœur divin.
Je sais avec quelle générosité la Compagnie de Jésus a accueilli cette admirable mission et avec quelle ardeur elle a cherché à la remplir le mieux possible au cours de ces trois derniers siècles: mais je désire, en cette occasion solennelle, exhorter tous les membres de la Compagnie à promouvoir avec plus de zèle encore cette dévotion qui correspond plus que jamais aux attentes de notre temps.
En effet, si le Seigneur a voulu dans sa Providence qu’au seuil des temps modernes, au XVIIe siècle, parte de Paray-le-Monial un élan puissant en faveur de la dévotion au Cœur du Christ, sous les formes indiquées dans les révélations reçues par sainte Marguerite-Marie, les éléments essentiels de cette dévotion appartiennent aussi de façon permanente à la spiritualité de l’Eglise au long de son histoire; car, dès le début, l’Eglise a porté son regard vers le Cœur du Christ transpercé sur la croix dont il sortit du sang et de l’eau, symboles des sacrements qui constituent l’Eglise; et, dans le Cœur du Verbe incarné, les Pères de l’Orient et de l’Occident chrétiens ont vu le commencement de toute l’œuvre de notre salut, fruit de l’amour du divin Rédempteur dont ce Cœur transpercé est un symbole particulièrement expressif.
Le désir de “connaître intimement le Seigneur” et de “faire un colloque” avec lui, cœur à cœur, est caractéristique, grâce aux Exercices spirituels, du dynamisme spirituel et apostolique ignacien, tout entier au service de l’amour du Cœur de Dieu.
Le Concile Vatican II, tandis qu’il nous rappelle que le Christ, Verbe incarné, nous “a aimés avec un cœur d’homme”, nous assure que “son message, loin de diminuer l’homme, sert à son progrès en répandant lumière, vie et liberté et, en dehors de lui, rien ne peut combler le cœur humain”. Auprès du Cœur du Christ, le cœur de l’homme apprend à connaître le sens véritable et unique de sa vie et de son destin, à comprendre la valeur d’une vie authentiquement chrétienne, à se garder de certaines perversions du cœur humain, à joindre l’amour filial envers Dieu à l’amour du prochain. Ainsi - et c’est la véritable réparation demandée par le Cœur du Sauveur - sur les ruines accumulées par la haine et la violence, pourra être bâtie la civilisation du Cœur du Christ.
Pour ces motifs, je désire vivement que vous poursuiviez par une action persévérante la diffusion du véritable culte du Cœur du Christ, et que vous soyez toujours prêts à apporter une aide efficace à mes frères dans l’épiscopat afin de promouvoir ce culte partout, en prenant soin de trouver les moyens les plus adaptés de le présenter et de le pratiquer, afin que l’homme d’aujourd’hui, avec sa mentalité et sa sensibilité propres, y découvre la vraie réponse à ses interrogations et à ses attentes.
De même que l’an dernier, à l’occasion du congrès de l’Apostolat de la prière, je vous avais particulièrement confié cette Œuvre étroitement liée à la dévotion au Sacré-Cœur, aujourd’hui également, au cours de mon pèlerinage à Paray-le-Monial, je vous demande de déployer tous les efforts possibles pour accomplir toujours mieux la mission que le Christ lui-même vous a confiée, la diffusion du culte de son Cœur divin.
Les fruits spirituels abondants qu’a produits la dévotion au Cœur de Jésus sont largement reconnus. S’exprimant notamment par la pratique de l’heure sainte, de la confession et de la communion des premiers vendredis du mois, elle a contribué à inciter des générations de chrétiens à prier davantage et à participer plus fréquemment aux sacrements de Pénitence et de l’Eucharistie. Ce sont là des voies qu’il est souhaitable de proposer aux fidèles aujourd’hui encore.
Que la protection maternelle de la Sainte Vierge Marie vous assiste: c’est lors de sa fête de la Visitation que cette mission vous fut confiée en 1688; et, dans votre labeur apostolique, que soit pour vous soutien et réconfort la Bénédiction Apostolique que je donne de grand cœur à toute la Compagnie de Jésus, depuis Paray-le-Monial!
Paray-le-Monial, le 5 octobre 1986.
IOANNES PAULUS PP. II
© Copyright 1986 - Libreria Editrice Vaticana
Copyright © Dicastero per la Comunicazione - Libreria Editrice Vaticana