DISCOURS DU PAPE JEAN XXIII
AU COMITÉ CENTRAL DE LA COMMISSION IMPÉRIALE
DU COMMONWEALTH BRITANNIQUE
POUR LES CIMETIÈRES DE GUERRE EN ITALIE
Salle du Trône
Mercredi 26 novembre 1958
Messieurs !
La mission qui vous réunit actuellement à Rome, en qualité de membres de la « Commission Impériale des tombes militaires », est une mission de fidélité reconnaissante à l'égard des milliers de soldats originaires de huit pays du Commonwealth, qui sont tombés sur le sol italien au cours des deux dernières guerres mondiales. C'est de grand cœur que Nous vous recevons, et Nous sommes heureux de vous livrer quelques pensées, que Nous suggère votre grande et belle tâche si conforme à tant de titres aux sentiments les plus profonds de rame chrétienne.
Votre présence évoque tout d'abord en Notre mémoire des souvenirs déjà lointains, mais qui demeurent parmi les plus émouvants d'une vie déjà longue. Ces hauts plateaux de l'Asiago, en effet, et ces terres baignées par le Piave, qui vous sont désormais rendus chers par la présence de tant de tombes des vôtres, Nous furent familières durant les années de la Grande Guerre, tandis que Nous y exercions les fonctions d'aumônier militaire. Combien de blessés n'y avons-Nous pas secourus ; à combien de mourants n'avons-Nous pas porté le réconfort d'une amitié et l'apaisement d'une dernière absolution ; combien de tombes n'y avons-Nous pas bénies, entouré des compagnons d'armes de celui qui venait de tomber au champ d'honneur ! Ministère sacerdotal profondément humain et fraternel, où le prêtre demeure au milieu des combattants le témoin des plus hautes valeurs morales et religieuses pour lesquelles ces hommes valeureux n'hésitent pas à donner leur vie.
En vous appliquant, Messieurs, à servir, par l'entretien de leurs tombes, la mémoire glorieuse des 45.000 soldats du Commonwealth qui reposent en terre italienne, vous ne servez pas seulement les morts. Vous maintenez chez les vivants le souvenir des sacrifices consentis par ces hommes et la résolution de demeurer fidèles à leurs exemples. Les âmes de foi, celles qui ne pleurent pas leurs défunts « comme les autres qui n'ont pas d'espérance » (cf. 1 Th 4, 13), aiment à vivre dans la compagnie et la familiarité de leurs chers disparus. Ce n'est pas là vaine nostalgie du passé, incapacité de faire face aux tâches d'avenir; bien au contraire, c'est par là que nous enrichissons notre pensée et notre action de tout le patrimoine spirituel et humain de générations qui nous ont précédées, de toutes les énergies puisées dans la conviction de poursuivre leur œuvre, de toute l'espérance chrétienne surtout de revoir un jour ce père, cet époux, tombé au combat. Agir ainsi n'est-ce-pas, Messieurs, faire preuve de foi, de culture et d'amour ?
Puisse votre action développer ces valeurs spirituelles, auxquelles la religion révélée par Dieu donne la garantie suprême. Ce faisant, vous n'entretiendrez pas seulement des tombes : vous contribuerez utilement à bâtir entre les hommes une société plus fraternelle ; vous servirez la cause d'une juste paix, qui Nous est si chère ! C'est dans cette confiance que Nous appelons sur vous, d'un cœur très paternel, l'abondance des divines bénédictions.
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