DISCOURS DU PAPE PAUL VI
AUX MEMBRES DU CONSEIL RÉSIDENT ET
AUX DIRECTEURS NATIONAUX
DES ŒUVRES PONTIFICALES MISSIONNAIRES
Vendredi 13 mai 1966
Chers Fils,
Membres du Conseil résident et
Directeurs nationaux des œuvres pontificales missionnaires,
Votre réunion annuelle de travail vous ramène à Rome ces jours-ci et Nous procure la joie de vous revoir. Qui plus que vous, représentants d’œuvres «pontificales», peut et doit se sentir ici «chez lui»? Cette demeure est la vôtre, en vérité, car, pour reprendre la phrase bien connue d’un de Nos prédécesseurs, vous êtes «les mains du Pape, tendues pour demander assistance en faveur de toutes les missions du monde». Assistance à la fois spirituelle et matérielle, l’une et l’autre plus nécessaires aujourd’hui que jamais.
C’est la- première fois que vous vous réunissez depuis la fin du Concile et le vote du Décret sur l’Activité Missionnaire de l’Eglise. Il vaut donc la peine de réfléchir quelques instants sur ce que cette circonstance peut apporter de nouveau à vos activités.
Il est certain que dans le champ missionnaire comme sur bien d’autres points, le Concile a apporté un nouvel éclairage, un changement de perspective. Et dans le domaine qui vous occupe, il est particulièrement important que chacun s’efforce d’en prendre pleinement conscience.
L’idée, le fondement même de la «mission» avait subi une sorte de dégradation dans l’esprit de beaucoup. L’idée de tolérance, en réaction contre un certain prosélytisme, contribuait à «démonétiser», pour ainsi dire, la sublime vocation du missionnaire. Le lien apparent, en bien des cas, entre «colonisation» et «mission» allait fatalement, à l’heure où s’affirmait le phénomène de la «décolonisation», provoquer un ébranlement dont les conséquences pouvaient être extrêmement fâcheuses.
Par ailleurs la prise de conscience assez soudaine, par l’ensemble de l’opinion publique, des immenses besoins des pays en voie de développement, entraînait, certes, des élans de générosité admirables, que Nos prédécesseurs et Nous-mêmes avons été les premiers à encourager et même à susciter dans une certaine mesure. Mais l’accent mis sur les nécessités matérielles de tant de malheureuses populations risquait d’obscurcir quelque peu, chez d’aucuns, ce qui, pour l’Eglise, reste primordial: la Parole de Dieu à transmettre, le message du salut à communiquer, en un mot: l’évangélisation.
Ces évolutions sur le plan des idées, s’ajoutant à bien d’autres facteurs qu’il serait trop long d’analyser, ne tardèrent pas à s’inscrire dans les faits; et l’on a assisté, en ces dernières années, à une baisse régulière et préoccupante du recrutement des Instituts missionnaires. Nous avons eu sous les yeux, pendant le Concile, une statistique communiquée par un évêque, qui mentionnait pour les départs en mission ces dernières années les chiffres suivants:
Départs en 1952: 850; en 1956: 650; en 1961: 330.
C’est à ces conséquences inquiétantes que l’œuvre du Concile peut et doit apporter un remède qui ne soit pas simplement une «recette» empirique, au plan des faits, mais d’abord une œuvre de profonde réflexion, au plan de la théologie. Il est symptomatique, en effet, que la volonté très nette des pères conciliaires s’étant manifestée en ce sens, une si grande extension ait été donnée au Décret «Ad gentes», qui ne devait comporter initialement, vous vous en souvenez, que quelques brèves propositions.
L’idée de mission a été, au cours de la discussion de ce schéma, convenablement approfondie, appuyée de principes doctrinaux, et rattachée, dans un premier chapitre du Décret, à son véritable et solide fondement théologique: la mission même du Christ, envoyé par le Père pour le salut des hommes. Et tout le reste du document peut être considéré comme une illustration et une «revalorisation» en quelque sorte - nullement polémique, mais au contraire très sereine et positive - de l’idée de mission, dans ses divers développements au plan des activités, des personnes, des lieux et des institutions.
C’est de ce texte capital que doit évidemment s’inspirer désormais toute votre action. C’est aussi votre intention et votre volonté, Nous le savons et Nous sommes heureux d’avoir cette occasion de vous en féliciter.
Mais il y a plus. Au delà de ce décret particulier, on peut dire qu’une des grandes idées qui se dégagent de l’ensemble des textes conciliaires, c’est que la mission n’est pas le fait de quelques spécialistes. C’est l’Eglise tout entière qui est et qui doit se montrer missionnaire.
Vous voyez donc toute l’importance du rôle que peuvent jouer, en cette période post-conciliaire, les Œuvres pontificales que vous représentez. Elles ont à développer avec une ardeur renouvelée, parmi les prêtres, les séminaristes, les religieuses, et dans tout le peuple chrétien, l’esprit missionnaire.
Des résultats encourageants sont déjà sous les yeux de tous: ce sont les heureux développements pris par ces œuvres: Propagation de la Foi, «Saint Pierre Apôtre», Union Missionnaire du Clergé, sans oublier la quatrième œuvre pontificale missionnaire, qui Nous est très chère aussi, la «Sainte Enfance», en continuelle et prometteuse augmentation d’année en année.
C’est de tout cela qu’il convient de prendre acte, pour en remercier Dieu, d’abord, et pour donner, en ce lendemain de Concile, un nouvel élan à des activités auxquelles vous consacrez le meilleur de vous-mêmes.
Il Nous semble que votre effort sera particulièrement béni de Dieu s’il s’adresse notamment aux jeunes. On entend dire bien du mal, parfois, de la génération montante. Et pourtant Nous ne saurions oublier l’imposant spectacle qu’il Nous était donné de contempler ici même, il y a quelques semaines: plus de 4.000 pèlerins du «Service Missionnaire des Jeunes», venus de France, attestant, par leur présence autour du Vicaire de Jésus-Christ, l’extraordinaire sensibilité de la jeunesse d’aujourd’hui à l’esprit et à l’idéal missionnaires, quand on sait le leur présenter d’une manière qui trouve un écho dans la générosité foncière de leurs âmes.
C’est sur cette vision réconfortante que Nous voulons prendre congé de vous, chers Fils, en vous remerciant de votre visite, en invoquant sur les résultats de vos travaux les meilleures faveurs célestes et en vous accordant à tous de grand cœur, ainsi qu’à vos collaborateurs et associés, en gage de Notre constante bienveillance, une large Bénédiction Apostolique.
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