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DISCOURS DU PAPE PIE XII
AUX DÉLÉGUÉS DE LA CONFÉRENCE INTERNATIONALE DE RADIODIFFUSION À HAUTE FRÉQUENCE*

Salle du Consistoire - Vendredi 5 mai 1950

De grand cœur, Messieurs, Nous vous souhaitons ici la bienvenue et Nous saisissons cette occasion de vous témoigner le grand intérêt que Nous prenons à vos travaux dont Nous apprécions et la difficulté et l'importance.

Certes, les difficultés sont multiples, les problèmes ardus. Difficultés et problèmes d'ordre technique, qui ne font que s'aggraver à mesure que s'intensifie et se répand l'usage des télécommunications. L'encombrement des rues de nos grandes métropoles semble parfois inextricable et fait envisager avec anxiété ses futurs développements ; il ne montre toutefois qu'un aspect partiel, le plus immédiatement perceptible de la situation. C'est, à leur tour, l'océan, en surface et en profondeur, c'est l'air, c'est la stratosphère et l'ionosphère qui se trouvent envahis, eux aussi jusqu'à l'encombrement, lequel ne peut faire que croître et embellir. Les perfectionnements de l'outillage et des méthodes, si admirables qu'ils puissent être, ne sauraient suffire à y parer. Non moins que la circulation des véhicules et des piétons sur le sol, celle des ondes exige une « réglementation » de leur usage. En d'autres termes, cet usage doit forcément être limité par une discipline.

Or, cette limitation fait surgir à son tour de nouvelles difficultés, de nouveaux problèmes, des difficultés et problèmes d'ordre national et international.

S'il ne s'agissait encore que d'intérêts véritables, une entente loyalement fraternelle pourrait venir à bout, sinon de les concilier parfaitement, du moins de répartir équitablement les sacrifices. Mais d'autres complications surviennent. Qu'il suffise ici de faire allusion à certains contrastes de caractère politique ou idéologique. Mais, en outre, que de susceptibilités ou rivalités sur le plan national, culturel, social, économique ! Elles sont peut-être, au fond, moins importantes que les complications susdites, pourtant, parce que c'est sur elles que l'humanité se montre d'ordinaire plus rétive aux concessions réciproques, elles viennent fâcheusement entraver les efforts de ceux qui assument la tâche, ensoi déjà si ardue, de la technique et de l'organisation.

C'est au milieu de ces difficultés et en vue de les aplanir le mieux possible que vous avez à manœuvrer pour mettre, autant que faire se peut, tout le monde d'accord. Vos efforts, Messieurs, sont hautement méritoires. Ce qui doit vous soutenir, c'est la conviction solidement fondée de servir la cause de l'humanité, des individus, des nations, des sociétés, la cause de la civilisation, de l'union, de la paix.

On entend parfois formuler des plaintes au sujet des méfaits de la radio et de son rôle dans la perversion des esprits et des mœurs. Faudrait-il donc, parce que la malice de quelques-uns abuse des dons de Dieu et des découvertes de l'homme, se frustrer soi-même et les autres du bénéfice qui en était la fin providentielle ? A coup sûr, il faut condamner et flétrir les abus ; mieux encore, il faut prendre pour les réprimer les mesures les plus efficaces. Quant aux acquisitions dont chaque génération s'enrichit, il faut, au contraire, les valoriser et faire en sorte que le bien qui en résulte grâce à l'action des hommes de science et de conscience, surpasse et neutralise le mal fait par d'indignes exploiteurs.

Ce bien est incalculable et dans tous les domaines. Même dans le domaine directement pratique, qui pourra suffisamment louer les immenses services rendus par la radiodiffusion en cas de détresses urgentes et d'extrême péril ? Qui dira l'utilité sociale des informations dans les communications échangées entre tous les membres de la grande famille humaine ? Qui pourra évaluer le profit qu'apporte à la culture générale la possibilité de faire entendre les conférences et leçons les plus variées, de faire goûter les charmes élevants de la belle diction et de la belle musique ?

Nous n'insistons pas sur tous ces avantages, ayant eu l'occasion d'en parler expressément, il y a près de trois ans, au cinquantième anniversaire des découvertes de Marconi (3 octobre 1947. - Discorsi e Radiomessaggi, t. IX, p. 261 et suiv.).

À tout cela l'Église, disions-Nous, s'intéresse. Faut-il s'en étonner ? Elle est au-dessus des diversités nationales, elle est  universelle. Elle trouve dans la radiodiffusion un concours éminemment précieux à l'accomplissement de sa mission propre. Il est vrai que l'audition par radio d'une messe n'est pas la même chose que l'assistance personnelle au divin sacrifice. La radio ne remplace pas complètement les contacts personnels. Mais, de quelle ressource elle est pour le Chef suprême de l'Église et pour les autres pasteurs des âmes, à qui elle permet de parler directement à leur fils et filles spirituels, de prier avec eux !

Quelle force intime et quel stimulant religieux peut apporter le microphone, qui pour beaucoup est souvent l'unique réconfort, l'unique soutien, qu'ils puissent recevoir du dehors. Pensez donc à ces milliers de malades cloués sur leur lit, aux populations qui n'ont ni église ni prêtre. Par la radio, du moins, ils peuvent encore vivre en communication avec les sources de la foi et de la grâce.

Voilà pourquoi, et vous l'avez compris, cette Cité du Vatican a tenu à prendre sa part de collaboration à tous les travaux concernant la radio, à installer et développer sa propre station. Elle n'a point, comme les autres États, ses intérêts politiques à promouvoir ; elle en a de plus hauts et de plus sacrés.

Avec raison, la radiodiffusion se regarde comme revêtue d'une mission éducative, mais à la condition toutefois qu'elle ne laisse pas à l'écart de l'accomplissement de cette mission, ce qui en est la fin principale: image de Dieu, l'homme a le devoir de parfaire en lui la divine ressemblance dans sa manière de penser, de vouloir, d'agir. C'est à l'y aider que doit tendre toute éducation. Le corps de l'homme, sa vie temporelle et matérielle, doivent être l'objet de respect et de soin: Nous l'avons souvent rappelé. Son âme et sa vie intellectuelle et spirituelle est incomparablement plus digne de sollicitude ; elle est, en fin de compte, l'ultime et suprême raison de toute instruction et de toute éducation. Comment la radio pourrait-elle donc exclure du nombre de ses devoirs et des fins qu'elle poursuit, la formation religieuse ?

Nous prions Dieu de bénir les conclusions de votre Congrès, afin qu'elles servent, d'une part, au progrès de l'entente, de l'union, de la paix, d'autre part, au bien, même temporel, au perfectionnement intellectuel, moral, religieux, de l'homme.


* Discours et messages-radio de S.S. Pie XII, XII,
Douzième année de Pontificat, 2 mars 1950 - 1er mars 1951, pp. 53-55
Typographie Polyglotte Vaticane

 



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