Palais Pontifical de Castel Gandolfo - Mercredi 15 novembre 1951
À la suite de tous les bouleversements qui ont marqué ou, plus exactement hélas !, au milieu de tout le désarroi qui continue de caractériser ce siècle arrivé déjà plus qu'à son milieu, on sent fermenter dans toutes les classes et dans tous les esprits, un vague mais intense besoin de concorde, d'unité, de coopération entre les hommes et les groupes, les plus divers et les plus opposés. On cherche, au sein même des oppositions, à découvrir un terrain d'entente, si étroit soit-il, où l'on puisse s'accorder, un refuge où l'on puisse reprendre haleine, une plate-forme de départ et de convergence en vue d'une union plus parfaite.
C'est ainsi que, durant ces dernières années, se sont multipliés en nombre incalculable les organisations, comités, congrès internationaux, de composition plus ou moins générale, ou très spécialisée, destinés à mettre en commun le fruit de leurs études, de leurs travaux, de leur expérience. Si Nous voulions recenser uniquement ceux de ces groupes qui ont sollicité Notre accueil et Nos encouragements, la liste serait bien longue. Comme si tous ces essais tendaient a une coopération encore plus universelle, totale même, vous avez conçu, Messieurs, le dessein d'unifier ces unités particulières elles-mêmes à l'aide d'un « Comité international pour l'unité et l'universalité de la culture ».
Votre ambition est stimulée par la conviction qu'un contact plus large peut conduire à une entente plus intime, et qu'un grand courant de sympathie, passant dans toutes les branches de la culture, peut contribuer heureusement à stériliser les levains de discordes intellectuelles, qui résultent en grande partie de compétitions d'ordre plus matériel et pratique, sans doute, mais qui, en retour, les aggravent et intoxiquent toutes les relations.
Ce qu'il s'agit surtout de promouvoir par cette « universalité de la culture », c'est moins, si utile soit-elle, la mise en commun des spécialités propres à chaque pays, à chaque peuple, que la coopération de leurs aptitudes diverses. Les tempéraments, les caractères, les traditions, le climat aussi, infusent, pour ainsi dire, et cultivent ces aptitudes qui, appliquées en cordiale collaboration à un même objet, se complètent les unes les autres et conduisent à une plus parfaite réalisation. C'est en somme dans le domaine intellectuel, ce qu'est, dans le domaine industriel ou économique, la division et la distribution du travail suivant les compétences. Un minimum de culture générale, proportionnée aux conditions personnelles, est nécessaire à tous, évidemment ; néanmoins, en quelque ordre de travaux que ce soit, telle nation excelle davantage dans les recherches érudites des sources, telle autre dans l'analyse ou la synthèse des matériaux inventoriés, telle dans leur élaboration, telle autre dans la présentation et la mise en valeur. C'est ainsi que les peuples, loin de se faire concurrence et de s'opposer entre eux, prendront goût à se compléter mutuellement, chacun apportant ses dons et chacun bénéficiant des dons de tous les autres.
Vous l'avez heureusement compris, Messieurs ; vous avez compris combien stériles, combien désastreux plutôt, sont les efforts de trop d'utopistes, qui prétendent établir l'unité grâce au nivellement par en bas. Cette unité si désirable, vous aspirez, vous, à la réaliser par en haut, aidant chaque nation, chaque peuple, à s'élever avec ses caractères propres, ses richesses matérielles et spirituelles respectives, vers les sommets. Mais vous avez compris aussi, et vous le déclarez bien haut avec une noble fierté, que cette unité ne tendra vers sa perfection que dans la mesure où elle se cherchera en Dieu, dans la charité éclairée par la science, selon la vérité unique de l'Évangile, sous la conduite de l'Église une et sainte.
Que cet effort, plus fécond que bruyant, soit votre part à l'œuvre tant désirée de l'union sincèrement cordiale de l'humanité. Nous ne pouvons qu'y applaudir et appeler sur lui la lumière et l'aide divines, en gage desquelles Nous vous donnons de tout cœur, à vous, à vos collègues et à vos familles, Notre Bénédiction apostolique.
* Discours et messages-radio de S.S. Pie XII, XIII,
Treizième année de Pontificat, 2 mars 1951 - 1er mars 1952, pp. 375-376
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