DISCOURS
DE LA FÉDÉRATION INTERNATIONALE
DES PRODUCTEURS AGRICOLES
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Salle du Consistoire - Mercredi 10 juin 1953
La sixième Assemblée Générale de la Fédération Internationale des Producteurs Agricoles, qui se tient actuellement à Rome, Nous donne l'occasion de saluer en vous, Messieurs, un de ces grands organismes nés depuis le dernier conflit mondial en vue de donner aux relations économiques internationales une orientation conforme aux réalités d'aujourd'hui.
Les activités qu'elle a déjà déployées portent sur de vastes domaines. Se tenant au courant du travail des diverses associations qui la constituent, elle fournit d'abord à ses membres une information intérieure, afin que chacun d'eux profite des études, de l'expérience et des initiatives des autres. Suivant également l'évolution des institutions intergouvernementales, elle s'efforce de coordonner, pour les leur présenter, les points de vue des organisations d'exploitants agricoles du monde entier. Elle émet des recommandations et publie des études portant sur l'organisation des marchés mondiaux, les politiques économiques mondiales et la place qu'y tient l'agriculture. Elle s'intéresse au développement des pays insuffisamment développés, aux mouvements de migration et aux réformes agraires. Un Comité Européen pour la Reconstruction Economique collabore activement à une meilleure intégration de l'économie européenne. Les problèmes de la Coopération agricole tiennent enfin une part importante dans ses préoccupations et ont donné lieu à des études et des initiatives fructueuses. Ce simple coup d'œil sur les questions, qui relèvent de son programme, montre suffisamment l'importance de la Fédération Internationale des Producteurs Agricoles. Elle groupe désormais bon nombre des grandes associations nationales d'une trentaine de pays, et son influence croît d'année en année. Un travail considérable a été fourni et des résultats sérieux obtenus.
Peut-elle se flatter toutefois d'avoir déjà atteint des objectifs importants ? Bien peu sans doute, étant donné la complexité des problèmes à résoudre et l'ampleur des réformes souhaitées. Les quelques années d'existence de votre Fédération suffiraient à enseigner, s'il en était besoin, la lenteur avec laquelle cheminent les idées les plus fécondes, quand elles se heurtent à des intérêts contraires. L'expérience l'a maintes fois prouvé: pour faire prévaloir des solutions rationnelles, la seule raison ne suffit pas. Il y faut une grande énergie et un grand dévouement. Celui qui représente les intérêts des autres, celui qui travaille pour eux, doit être dominé par la volonté de servir. Il doit croire au bien fondé de son action et se donner sans calcul à une grande œuvre.
Qu'il Nous suffise d'évoquer à nouveau le noble but de votre Fédération : servir ceux qui tirent de la terre leurs moyens de vivre. Défendre les intérêts d'une partie importante de l'humanité, de cette partie de l'humanité qui fournit aux autres le soutien essentiel de la vie, n'est-ce pas une cause digne d'un dévouement désintéressé ? L'Église a toujours déploré — en parfait accord d'ailleurs avec votre organisation et avec les hommes de bonne volonté — la situation actuelle anormale: d'une part, la production agricole menace d'être limitée par son manque de rentabilité, tandis que, d'autre part, on constate chez des peuples entiers la sous-alimentation et la disette la plus aiguë. Le remède, il faut le chercher dans la direction d'une stimulation nouvelle et d'une stabilisation rationnelle des relations économiques des peuples, et cela ne vaut pas seulement dans le domaine de l'agriculture. Mais on peut aussi, en restant dans l'esprit de la doctrine sociale de l'Église, dénoncer une erreur essentielle du développement économique depuis l'apparition de l'industrialisme moderne: le secteur agricole est devenu, de façon tout à fait anormale, une simple annexe du secteur industriel et surtout du marché. Un certain nombre d'économies nationales n'ont pas réussi à développer harmonieusement les possibilités de production que la nature leur a données. Nous ne pouvions omettre d'attirer votre attention sur cette question qui est une des bases de toutes les relations internationales. Ceci supposé, une fédération internationale comme la vôtre peut normalement exercer une influence de portée mondiale, contribuer à une meilleure organisation des marchés, à une intensification du commerce, à une élévation du niveau de vie de la grande famille des cultivateurs.
Tel est le but que vous proposez, Messieurs, tel est aussi le vœu que Nous formons, en vous encourageant à le poursuivre avec constance et fermeté. Et pour attirer sur vous-mêmes, sur vos travaux, vos familles et vos associations, la toute puissante intervention de Dieu, Nous vous donnons de grand cœur Notre Bénédiction apostolique.
* Discours et Messages-radio de S.S. Pie XII, XV,
Quinzième année de pontificat, 2 mars 1953 - 1er mars 1954, pp. 199-200
Typographie Polyglotte Vaticane.
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