DISCOURS DU PAPE PIE XII
AUX PARTICIPANTS AU SYMPOSIUM INTERNATIONAL
EUROPÉEN DE LA « CHARLES PFIZER CORPORATION »*
Salle du Consistoire - Jeudi 12 mai 1955
C'est pour Nous un plaisir sans cesse renouvelé de saluer les hommes de science, qui comme vous, Messieurs, se réunissent à Rome pour leurs congrès internationaux. Nous aimons voir se multiplier, sur le terrain fructueux des recherches scientifiques, rencontres et collaborations, car Nous y voyons la réalisation des lois supérieures posées par le Créateur au travail de l'homme, et un gage de paix dans une fraternité plus profonde, celle du travail et de l'entr'aide.
Si les chercheurs isolés peuvent encore rendre de grands services à l'humanité, rien ne peut désormais remplacer le travail en commun, dont les congrès internationaux sont les manifestations les plus apparentes et les plus significatives. Dans le vaste domaine de la biologie, dont vous cultivez une partie bien précise, les spécialisations se font de jour en jour plus étroites, car la complexité presque infinie de la vie impose une division du travail très poussée. Qui aurait cru en effet, il y a peu d'années encore, qu'un Symposium sur le thème de la nutrition animale réunirait à Rome des personnalités scientifiques éminentes, représentant quinze pays d'Europe ? À présent, le grand public comprend aisément le but de telles rencontres : améliorer la nutrition animale, c'est contribuer à promouvoir l'un des secteurs importants de l'économie et faire avancer la solution d'un problème, qui angoisse la majeure partie de l'humanité.
Tout récemment encore, dans Notre message pascal, Nous rappelions l'incidence des découvertes modernes en matière de radiations sur la culture et la conservation des végétaux, et Nous évoquions les heureuses conséquences que l'on pouvait en attendre pour l'alimentation humaine. Aussi avons-Nous trouvé le plus grand intérêt à prendre connaissance des expériences, qui se déroulent dans un domaine analogue : l'utilisation des antibiotiques dans la nutrition animale.
Vous connaissez bien, Messieurs, la carrière brillante fournie en quelques années par ces médicaments et l'extension considérable de leur utilisation. Alors que la découverte de Sir Alexandre Fleming, en 1928, n'avait pas soulevé à ce moment tout l'intérêt qu'elle méritait, la guerre amena deux médecins de l'Université d'Oxford à reprendre l'étude de la pénicilline, et bientôt les résultats étonnants de son application en firent décider la fabrication massive. Les savants se mirent alors avec ardeur à isoler d'autres antibiotiques, à en étudier les propriétés, les possibilités d'application à la thérapeutique humaine. Il s'agissait de trouver les produits les plus actifs possible, mais qui fussent en même temps exempts de toxicité et parfaitement tolérables pour l'organisme. Deux réussites très intéressantes couronnèrent leurs efforts : la découverte de la streptomycine, en 1943, et celle de la terramycine en 1950. Celle-ci est le fruit d'une investigation systématique, poursuivie sur plus de 100.000 échantillons de terrain, prélevés dans toutes les parties du monde, et que, après de multiples sélections, finit par livrer le « streptomyces rimosus », d'où provient la terramycine. Cette substance antibactérique se révéla efficace dans le traitement de près de quatre-vingts maladies, tandis qu'elle était dépourvue, même à fortes doses, d'effets nocifs pour l'homme.
On pouvait croire que l'emploi des antibiotiques se limiterait à la lutte contre les maladies infectieuses. Mais après avoir rendu des services inestimables dans ce domaine, voici qu'ils trouvent, dans la nutrition animale, un champ d'application inattendu peut-être, mais prometteur. Pour éprouver leur efficacité, on a soumis à l'expérimentation des milliers de têtes de bétail, dans des stations agricoles destinées à cette fin. Il s'est créé une classe particulière de techniciens, appelés « nutritionnistes », qui se spécialisent dans ce genre de recherches. Après avoir révélé leurs mérites comme stimulants des mécanismes de la nutrition et de la croissance, les aliments mêlés d'antibiotiques sont employés sur une vaste échelle.
En organisant ce Symposium international européen, la Charles Pfizer Corp. veut promouvoir l'étude scientifique des nouveaux procédés de nutrition du bétail. Nous sommes heureux en cette occasion de manifester Notre gratitude aux représentants de cette société pour l'aide généreuse qu'elle apporta à l'Italie lors des graves inondations qui désolèrent le pays. Nous la félicitons spécialement de l'ardeur qui anime ses dirigeants, ses chercheurs, ses techniciens, dans la production industrielle des antibiotiques, qui, depuis une dizaine d'années, ont sauvé d'innombrables vies humaines.
Nous osons croire, Messieurs, que vos échanges de vues et vos discussions contribueront largement à la solution des difficultés pratiques de l'élevage et, par là, à l'accroissement des ressources alimentaires du globe. Comment, en effet, ne penserions-Nous pas avec sollicitude à ces millions d'hommes qui, chaque jour, ne trouvent qu'avec peine le strict nécessaire pour se sustenter ? Que l'assurance d'apporter par vos travaux quelque soulagement à ces déshérités, vous soutienne et vous stimule ! Que, du haut des cieux, vous protège le Tout-Puissant, à qui Nous vous confions, ainsi que vos familles et tous ceux que vous aimez et désirez recommander à Nos prières ! À toutes ces intentions, Nous vous accordons de grand cœur Notre paternelle Bénédiction apostolique.
* Discours et messages-radio de S.S. Pie XII, XVII,
Dix-septième année de Pontificat, 2 mars 1955 - 1er mars 1956, pp. 83-85
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