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DISCOURS DU PAPE PIE XII
AUX COMITÉS POUR L'UNITÉ ET L'UNIVERSALITÉ DE LA CULTURE*

Salle du Consistoire - Samedi 5 mai 1956

 

Nous avons été très sensibles, Messieurs, aux termes si élevés et si déférents de l'adresse que Nous a transmise la Présidence de votre Comité, et c'est de grand cœur que Nous répondons aux désirs exprimés dans les discours et les vœux, qui ont marqué votre séance solennelle du 15 mars dernier.

Le Comité International pour l'Unité et l'Universalité de la Culture poursuit depuis sa fondation un idéal généreux et désintéressé, digne d'être proposé en exemple à tous ceux qui veulent concourir efficacement à l'élévation morale de l'humanité. Non contents de favoriser les échanges culturels entre les peuples, vous désirez désormais travailler plus directement à la grande œuvre de paix, que Nous ne cessons de promouvoir. Volontiers Nous accueillons l'occasion qui Nous est offerte d'encourager et de bénir cet effort, car la résolution de contribuer à l'union des esprits et des cœurs correspond aux fins que l'Église elle-même, sur un plan supérieur, a reçu pour mission d'assurer, et Nous savons la force que la plupart d'entre vous trouvent dans cette pensée.

Une croisade comme la vôtre se heurte par sa nature même à de lourds obstacles, que seule une foi solide peut affronter: indifférence et inertie, scepticisme et égoïsme risquent d'étouffer les plus beaux élans ; les fruits mêmes, que certains pourraient escompter de leur collaboration, pourraient faire exploiter à des fins particulières un mouvement, qui au contraire veut et doit demeurer universel. Mais rien de tout cela ne saurait vous arrêter : convaincus de la valeur dynamique des idées et de l'obligation qui incombe aux hommes de traduire en actes les suggestions de la vérité reconnue, vous êtes décidés à mettre au service des valeurs supérieures de la culture et de la paix les ressources de votre compétence et le rayonnement de votre autorité. Vous pensez, avec l'Auteur inspiré, que la justice produira la paix (cfr. Is. 32, 17), et vous estimez, non sans raison, qu'il existe une sorte de justice intellectuelle, condition préalable d'un monde plus fraternel, Nous voulons dire un devoir d'information et de compréhension mutuelle, qu'il faut mettre à la base de tout accord constructif, de toute collaboration profonde, de toute fédération internationale.

Cet effort de longue haleine constitue la tâche primordiale du Comité International pour l'Unité et l'Universalité de la Culture. Une si noble ambition devrait être partagée par quiconque reconnaît l'unité foncière de la famille humaine. Même ceux qui n'hésitent pas à l'admettre en théorie, reculent parfois devant les tâches pratiques qui s'ensuivent. Votre but est précisément de hâter leur mise en œuvre, d'en favoriser les conséquences. Si les obstacles géographiques à l'unité et à l'universalité de la culture, distances et climats, frontières naturelles ou étendue des océans, perdent chaque jour de leur importance comme facteurs externes, les conditions de vie sont encore loin malheureusement de favoriser cette égalité, que toutes les âmes généreuses appellent de leurs vœux. Nul ne peut plus en bonne conscience poser la question qu'adressait au Divin Maître, il y a bientôt deux mille ans, le légiste de l'Évangile : « Et qui est mon prochain ? ». Le prochain, c'est tout homme, le noir de l'Afrique centrale ou l'Indien des forêts de l'Amazonie, en attente de biens spirituels plus encore que de biens matériels. Les dons de la civilisation et de la culture ont l'avantage de ne pas se perdre en se répandant, mais au contraire de croître et de s'enrichir avec les espaces qu'ils conquièrent. Cette semence de lumière et de vie, ce goût nouveau pour la vérité, la beauté, la bonté, prospèrent en tout terrain, et comme le progrès de l'esprit — quand il est conforme à la vérité et à la bonté de Dieu — appelle celui de l'âme, le patient effort de l'éducateur et du maître fraye le chemin au pionnier de l'Évangile. Les nations les plus civilisées ont eu parfois des torts envers les peuples qu'elles ont pris en tutelle ; il faut reconnaître toutefois qu'elles apportaient des éléments de culture d'une valeur authentique et d'une fécondité inépuisable. Et ceux qui suscitaient dans le cœur d'autrui un sentiment d'estime et de reconnaissance pour leur propre nation, en évitant l'esprit étroit du nationalisme, ne perdaient pas leur temps: ils travaillaient pour l'unité et l'universalité de la culture.

Grâce à Dieu, à mesure que la conscience humaine perçoit plus vivement l'étendue et la portée de ses responsabilités, le règne de la vérité s'étend, des esprits chaque jour plus nombreux s'ouvrent à des perspectives plus larges, qui appellent cet ordre moral et juridique nouveau, que vous appuyez de l'autorité de votre science, de l'ardeur de vos convictions, de l'efficacité de vos initiatives. C'est pourquoi Nous souhaitons vivement la création du Conseil pour la Stabilité de la Paix, dont l'idée proposée par vous a déjà reçu bon accueil. L'activité d'une telle institution sera soutenue par la foi de ses membres dans le destin suprême de l'humanité, appelée à constituer une seule famille spirituelle, riche des trésors sans limites de son unique Créateur et Père.

Tel est le vœu que Nous formons et que Nous présentons à Dieu par l'intercession toute puissante de Celui, qui est mort non seulement pour sa nation, mais encore pour rassembler dans l'unité les enfants de Dieu dispersés (cfr. Io. 11, 51-52). Il ne Nous reste plus qu'à implorer sur vous-mêmes, sur vos familles, sur votre organisation et vos travaux l'effusion la plus abondante des grâces du ciel. En gage de quoi, Nous vous accordons Notre paternelle Bénédiction apostolique.


* Discours et messages-radio de S.S. Pie XII, XVIII,
 Dix-huitième année de Pontificat, 2 mars 1956 - 1er mars 1957, pp. 159-161
 Typographie Polyglotte Vaticane

 



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