MESSAGE DU PAPE FRANÇOIS
À LA XXXIe RÉUNION DES PARTIES AU PROTOCOLE DE MONTRÉAL
Aux participants à la 31e réunion des parties au Protocole de Montréal
Je présente mes salutations cordiales à tous les participants à la trente-et-unième réunion des parties au Protocole de Montréal relatif à des substances qui appauvrissent la couche d’ozone. Ce protocole, avec ses amendements et la Convention de Vienne sur la protection de la couche d’ozone, représente un modèle de coopération internationale non seulement dans le domaine de la protection de l’environnement, mais également dans celui de la promotion du développement humain intégral.
Près de trente-cinq ans se sont écoulés depuis que la première convention internationale juridiquement contraignante consacrée à la couche d’ozone a été ouverte à la signature à Vienne en mars 1985. Elle devait devenir la première convention du système des Nations unies à recueillir une adhésion universelle de la part de toute la famille des nations, qui compte aujourd’hui cent quatre-vingt dix-sept Etats signataires.
Ces trente-cinq années ont apporté des résultats positifs. En effet, de nombreuses études scientifiques, y compris récentes, attestent du fait que l’amincissement de la couche d’ozone se réduit progressivement.
A cet égard, je voudrais me concentrer sur trois leçons que nous pouvons tirer des trente-cinq ans qui se sont écoulés depuis l’application du régime international relatif à la couche d’ozone.
Premièrement, il est nécessaire de souligner et de reconnaître que ce régime est né d’une coopération vaste et fructueuse entre différents secteurs: la communauté scientifique, le monde politique, les acteurs économiques et industriels et la société civile.
Cette coopération a montré que nous pouvons «obtenir des résultats importants qui permettent simultanément de préserver la Création, de favoriser le développement humain intégral et d’œuvrer pour le bien commun, dans un esprit de solidarité responsable et avec des retombées profondes et positives pour les générations présentes et futures» (Déclaration jointe à l’instrument d’adhésion de la part du Saint-Siège à la Convention de Vienne sur la protection de la couche d’ozone et au Protocole de Montréal relatif à des substances qui appauvrissent la couche d’ozone et ses quatre premiers amendements, 9 avril 2008).
Dans un certain sens, le régime international relatif à la couche d’ozone démontre que «la liberté humaine est capable de limiter la technique, de l’orienter, comme de la mettre au service d’un autre type de progrès, plus sain, plus humain, plus social, plus intégral» (Laudato si’, n. 112). Cela nous permet d’être confiants dans le fait que, «alors que l’humanité de l’époque post- industrielle sera peut-être considérée comme l’une des plus irresponsables de l’histoire, il faut espérer que l’humanité du début du XXIe siècle pourra rester dans les mémoires pour avoir assumé avec générosité ses graves responsabilités» (Laudato si’, n. 165).
Nous sommes en effet face à un défi «culturel» du pour ou contre le bien commun. A cet égard, un dialogue honnête et fructueux véritablement capable d’écouter les différents besoins et libre de tout intérêt particulier, ainsi qu’un esprit de solidarité et de créativité, sont essentiels pour l’édification du présent et du futur de notre planète.
De la même façon, et c’est la deuxième leçon que je voudrais mentionner, on ne peut répondre à ce défi culturel uniquement sur la base d’une technologie qui, alors qu’elle «prétend être l’unique solution aux problèmes, de fait, est ordinairement incapable de voir le mystère des multiples relations qui existent entre les choses, et par conséquent, résout parfois un problème en en créant un autre» (Laudato si’, n. 20).
Cela a été mis en évidence par le besoin d’adopter, en 2016, un nouvel amendement au Protocole de Montréal, l’amendement de Kigali. Cet amendement a pour but d’interdire les substances qui, en soi, ne contribuent pas à abîmer la couche d’ozone, mais qui ont un effet sur le réchauffement de l’atmosphère et dont l’utilisation a augmenté comme moyen de remplacer certaines substances nuisibles à la couche d’ozone.
Il est important que l’amendement de Kigali obtienne rapidement une approbation universelle de la part de la famille des nations tout entière, comme cela a été le cas avec la Convention de Vienne et le Protocole de Montréal.
A cet égard, je suis heureux d’annoncer l’intention du Saint-Siège d’adhérer à l’amendement de Kigali. A travers ce geste, le Saint-Siège désire continuer à apporter son soutien moral à tous les Etats engagés dans la sauvegarde de notre maison commune.
La troisième leçon que je voudrais mentionner est l’importance que cette sauvegarde de notre maison commune soit ancrée dans la conscience que «tout est lié».
On peut dire que l’amendement de Kigali fait également appel à ce principe, car il représente une sorte de pont entre le problème de l’ozone et le phénomène du réchauffement de la planète, soulignant de cette façon leur interaction.
L’examen attentif des diverses interactions de nos décisions et de l’impact qui en découle implique de nombreux niveaux de complexité. Nous vivons à un moment historique caractérisé par des défis qui sont urgents mais stimulants en vue de créer une culture réellement orientée vers le bien commun. Cela exige d’adopter une vision clairvoyante sur la façon de promouvoir le plus efficacement possible le développement intégral de tous les membres de la famille humaine, qu’ils soient proches ou éloignés dans l’espace ou dans le temps. Cette vision doit prendre forme dans des centres d’éducation et de culture où une conscience est créée, où les personnes sont formées à la responsabilité politique, scientifique et économique et, plus généralement, où des décisions responsables sont prises.
L’accélération constante des changements affectant l’humanité et notre planète, associée aujourd’hui à l’intensification du rythme de vie et de travail, devrait constamment nous exhorter à nous demander si les objectifs de ce progrès sont véritablement orientés vers le bien commun et le développement durable et intégral, ou si ils détériorent notre monde et la qualité de vie d’une grande partie de l’humanité, à présent et à l’avenir (cf. Laudato si’, n. 18).
Une réponse réfléchie à cette question ne peut être apportée qu’à la lumière d’un examen des trois points que j’ai soulignés. Tout d’abord, donner véritablement vie au dialogue au nom d’une responsabilité partagée pour la sauvegarde de notre maison commune, dialogue dans lequel personne n’«absolutise» son point de vue. Puis, intégrer les solutions technologiques dans une vision plus large qui tienne compte de la variété des relations existantes. Enfin, structurer nos décisions sur la base du concept central de ce que nous pouvons appeler l’«écologie intégrale», enracinée dans la conscience que «tout est lié».
J’exprime mon espoir et ma prière pour que le régime international relatif à la couche d’ozone, ainsi que d’autres initiatives louables de la communauté mondiale sur la sauvegarde de notre maison commune, puissent continuer sur ce chemin complexe, exigeant, mais toujours stimulant.
Du Vatican, le 7 novembre 2019
François
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